Retour à l'histoire de quelques FAI

----------------------Histoire d'Oreka

 

Quatre associés fondent Oreka en janvier 2000 : David Bitton son PDG, Alain Delhaye qui fut responsable des offres Internet de Completel, opérateur de télécommunications français exclusivement destiné aux entreprises et aux organismes publics, Jérôme Wagner qui a collaboré à l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), et Olivier Gunti.

Sont actionnaires d'Oreka, iBazar qui y a investi 12 millions de francs (et hébergera la société naissante dans ses murs plusieurs mois), ainsi qu'un groupe de "business angels" qui a apporté 25 millions de francs.

Le 23 mai 2000, Oreka annonce une offre de 18 heures de connexion Internet par mois totalement gratuites, sans coût de communication et sans abonnement, amplifiant ainsi la guerre des tarifs menée par Liberty Surf ou Freesbee. Oreka l'appelle "L'accès internet gratuit de chez gratuit". Au-delà de ces 18 heures, seuls les coûts de communications facturées au tarif local sont à la charge de l'internaute. Oreka est le précurseur du " gratuit-gratuit ", car cette formule n'a à cette date pas d'équivalent en France.

D'un point de vue technique, l'opérateur télécom Cable & Wireless fournit l'infrastructure réseau IP d'Oreka (qui s'approvisionne aussi auprès de Télécom Développement et Completel).

Dans le kit, le CD-Rom sert uniquement à permettre la connexion à la plate-forme d'inscription du service Oreka. Après remplissage du formulaire en ligne, installation sur son PC d'un logiciel propriétaire de connexion sous Windows (l'offre est incompatible Mac) et une fois admis au service Oreka, l'internaute bénéficie d'un accès gratuit à Internet comprenant 18 heures de connexion par mois, communications téléphoniques incluses. Une fenêtre de navigation, développée en interne, occupant juste l'emplacement de la barre d'icônes d'Internet Explorer, apparaît. Des onglets permettent de consulter son compte, d'accéder au courrier électronique et aux pages personnelles. En outre, on y trouve un moteur de recherche intégré, des liens vers des sites classés par rubriques et, en dessous, une bannière publicitaire qui reste affichée pendant toute la durée de la connexion. Chaque bannière reste affichée pendant 45 secondes, ce qui laisse le temps à l'annonceur de passer son message. Il faut donc accepter cette contrainte pour profiter du surf sans frais. Autre originalité : une page d'accueil personnalisée en fonction du profil de l'internaute est proposée avec des partenaires comme Degriftour ou iBazar. Les espaces publicitaires seront commercialisés par la régie iBazar NetworksNetworks jusqu'en septembre 2000 où Oreka a récupéré la régie en interne. Enfin, au-delà des 18 heures incluses dans le forfait, le numéro d'appel est automatiquement modifié pour que l'utilisateur paye le prix d'une communication locale.

Le modèle économique d'Oreka repose donc sur la commercialisation du bandeau publicitaire permanent que représente la barre de navigation qui vient se sur-rajouter au navigateur de l'utilisateur et surtout la vente de la page d'accueil (se chargeant au démarrage) imposée à l'internaute.

Dépassé par son succès, Oreka a limité sa capacité à 2.000 nouveaux abonnés par jour et a dû mettre en place une liste d'attente. A la rentrée le délai d'attente était supérieur à 6 mois pour accepter les demandes d'inscription. En août 2000, le service ne peut enregistrer que 3 000 abonnements par jour et les internautes doivent se limiter à une offre limitée à 4 heures mensuelles gratuites dans un premier temps avant de pouvoir bénéficier réellement de la formule initiale. En octobre 2000, David Bitton, le PDG, affirme qu'Oreka a 540.000 abonnés, 290.000 inscrits à l'offre 18 heures et 250.000 à l'offre 4 heures, avec une croissance de 4.000 abonnés en moyenne par jour. La période de passage entre les deux offres est de 3 mois avec plus de 60.000 personnes qui basculent chaque mois de l'offre 4 heures à celle de 18 heures.

En octobre 2000, Oreka annonce une levée de fonds de 150 millions de francs, pour le financement de son développement, auprès de nouveaux investisseurs : Initiative IP en lui cédant 13 % du capital et Initiative & Finance, filiale du groupe Natexis. Initiative IP est un fonds créé par Jean-Luc Nahon, fondateur d'ISDNet, prestataire Internet intégré au groupe Cable & Wireless qui fournit l'infrastructure réseau IP d'Oreka.

Les ressources générées par une barre publicitaire affichée en permanence sur l'écran de l'abonné et la hot-line payante (2,21 F TTC la minute) ne suffisent pas à rentabiliser les 18 heures mensuelles offertes par le FAI. Aussi, début décembre 2000, Oreka annonce que son offre n'est plus proposée à hauteur de 18 heures mais ramenée à 6 heures par mois pour les nouveaux abonnés. La nouvelle formule sera appliquée à partir du premier janvier. Mais, juste avant Noël, le FAI décide finalement d'étendre cette mesure à l'ensemble de ses 700.000 abonnés actuels en supprimant la liste d'attente. " Nous supprimons notre formule à deux vitesses et permettons à tous d'obtenir immédiatement 6 heures de connexion et de communication gratuites. " explique le FAI.

La levée de fonds réalisée auprès d'Initiative IP s'avèrera être inférieure de plus de moitié à celle recherchée (65 millions de francs sur 150), ce qui contraint Oreka à revoir son modèle économique. Faute d'argent, Oreka doit aussi abandonner ses ambitions dans l'Internet rapide et à l'international (il voulait s'installer en Belgique, en Italie et Espagne).

En février 2001, Oreka annonce le remplacement de son forfait "gratuit-gratuit" par un système "deux tiers payants, un tiers gratuit". À partir du 1er mars, les abonnés d'Oreka pourront surfer sur l'internet pour une durée illimitée, mais devront régler le coût des connexions à 0,14 franc la minute sans distinction de plage horaire. Les internautes paieront donc les communications locales au tarif instauré le 17 février par France Télécom pour les FAI. Mais afin " de ne pas gagner de l'argent sur le compte de nos abonnés ", Oreka offre un tiers de temps de connexion supplémentaire en " heures détentes " gratuites. En clair, pour trois heures de surf, l'internaute gagnera une heure gratuite, à utiliser les soirs et les week-ends.

Après Liberty Surf, qui a abandonné en janvier son forfait " 4 heures d'internet gratuit communications comprises pour zéro franc ", Oreka était le dernier FAI en France à proposer un abonnement gratuit, communications comprises.

En juillet 2001, Oreka qui commercialise toujours son offre accès gratuit avec communications au tarif local Internet, lance deux forfaits tout compris compétitifs : - un forfait de 10h pour 6 € (soit 39,36 F), l'heure de communication revient à 3,94 F
- un forfait de 25h pour 12 € (soit 78,72F), l'heure de communication revient à 3,15 F.

Malgré cela, même si Oreka revendique le rang de sixième fournisseur d'accès français, avec 200.000 abonnés actifs et payants en mars 2002, ce nombre est en nette diminution (520.000 actifs et 900.000 inscrits il y a un an).

Le manque d'argent contraint le FAI à faire appel au holding financier Firstream qui rachète Oreka en mars 2002. Créée en 2000, la société Firstream a principalement été financée par ses fondateurs, dont le PDG Jean-Christophe Chopin et Lou Gonda, qui avaient lancé précédemment le courtier en ligne NetBourse, revendu à E*Trade fin 1999. Cette discrète start-up a acheté en mai 2000 l'Ofup (Office universitaire de presse), société présente dans 5 pays d'Europe qui diffuse des abonnements on et offline de presse et de magazines auprès des étudiants et détient la centrale d'achat FirstCampus. Par ailleurs, elle propose déjà divers services Internet: accès, hébergement, courrier électronique, sécurité...

Dans les mois qui suivent, Firstream, propriétaire de l'Ofup, intègre Oreka dans son package d'offres. Les équipes du FAI ont été incorporées dans l'organigramme de Firstream France ; le fondateur d'Oreka, David Bitton, a ainsi pris le poste de directeur général. Sur le plan technique, l'objectif est de fusionner les offres d'accès Internet de Firstream (France-Teaser notamment) et Oreka sur une même plate-forme pour faciliter l'exploitation. Bien entendu, on voit bientôt apparaitre l'Ofup sur des kits Internet Oreka.

Début septembre 2002, ce nouveau soutien permet à Oreka de rentrer dans la course aux abonnements ADSL (kit), après Wanadoo, AOL, Club-Internet, Magic OnLine, 9Telecom et Tiscali. Il propose le forfait 512 kbit/s parmi les moins chers du marché à 39,95 euros. Le modem, généralement vendu 150 euros, mais gratuit (sous conditions) chez Club-Internet est proposé par Oreka à 99,95 euros.

Oreka continue naturellement de proposer des forfaits "tout compris" (communications incluses dans le tarif). L'offre était de 3 forfaits tout compris (accès + communications) : 5h pour 5€, 10h pour 8€, 20h pour 12€50 puis 50h pour 14€50 à partir du mois de décembre 2002.

Début 2004, Oreka suit le mouvement du dégroupage et propose un abonnement ADSL 1024 kbit/s à moins de 25€. Mais si l'avenir du marché grand public est dans le dégroupage, la construction de réseau demande des investissements considérables dans un univers très concurrentiel.

Même si son intégration dans Firstream a permis à Oreka de compter sur la force de vente de l'Ofup dans les lycées et universités françaises et malgré des offres intéressantes aussi bien techniquement que financièrement, le nombre des abonnés n'a cessé de s'éroder.

Oreka cesse définitivement son activité le 31 mai 2005, un mois après le rachat de Tiscali par Telecom Italia/Alice et l'arrêt des activités de La Poste en tant que fournisseur d'accès. Des lettres ont été envoyées à tous les abonnés (qui ne sont plus que 30000 environ), leur recommandant de s'orienter vers Club-Internet. Le directeur d'Oreka, Philippe Charaix, explique : "Parmi les FAI que nous avons approchés, Club-Internet nous paraissait offrir l'offre la mieux adaptée et un service clientèle le plus convenable". Ceux qui migreront d'Oreka vers Club-Internet se verront offrir l'installation et le premier mois d'abonnement. M. Charaix ajoute : "Face au contexte concurrentiel et à la politique agressive des principaux opérateurs, je pense et je constate qu'il n'y a plus de place pour les FAI qui ne sont pas propriétaires de leur infrastructure réseau". A cette époque, il n'y a que France Télécom, Free, Neuf Telecom et Cegetel qui le sont ; ces deux derniers venant d'ailleurs d'officialiser leur fusion le 11 mai 2005, confirmant le mouvement de restructuration du marché.

 

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