Retour à l'histoire de quelques FAI

----------------------Histoire d'Internet Telecom (et de Tigranet)

     
 

Internet Telecom est une société prestataire de service créée en février 1999 par Sébastien Crozier et Xavier Blanchot, avec Gilles Casanova, qui est à la fois fournisseur d'accès à Internet sous marque blanche (pour des entreprises tierces), web agency et régie publicitaire.

Internet Telecom négocie les minutes de communications avec les opérateurs de télécommunications, crée le serveur d'accès et gère la hotline. Internet Telecom va ainsi créer les premiers VISP (Virtual Internet Service Provider - fournisseur de services Internet virtuel) en infogérance sous marque blanche. Grâce à lui, la fourniture d'accès gratuit à Internet n'est plus restreinte à des sociétés dont c'est le métier de base, mais est possible pour toutes celles désireuses de se lancer dans l'accès internet, sans qu'elles aient à s'occuper elles-mêmes de la prestation télécoms, qui est donc sous-traitée à Internet Telecom.

Le groupe Internet Telecom entend fournir clef en main aux grandes marques tous les services nécessaires à leur stratégie Internet : avec Axidium pour les recettes publicitaires online ; Mediamix pour l'édition déléguée de contenus ; son Kiosque WAP pour les portails mobiles ; Internet Telecom pour la tierce-maintenance applicative de la fourniture d'accès, hébergement compris ; Internet Performance prestataire e-CRM (Customer Relationship Management) pour la gestion de la relation client en ligne avec un centre d'appels (hotline et emails).

Dès 1999, sont créés vnunet.fr (pour les éditions VNU), Fnac.net (pour la Fnac), Mageos (pour PPR Interactive du groupe Pinault-Printemps-Redoute).
En 2000, suivront AltaVista (du moteur de recherche éponyme), Voonoo (pour la Société Générale) et M6net.fr (pour le groupe M6).

L'offre Tigranet

En juin 1999, Internet Telecom décide d'entrer sur le marché de l'Internet gratuit (hors coût de communication locale) de façon plus directe comme fournisseur d'accès en proposant une offre co-brandée Tigranet (ou Tigr@net, (kit) avec le Crédit Maritime Mutuel d'abord.
A compter du 30 juin, la banque mutualiste, présente sur tout le littoral métropolitain et aux Antilles, va proposer cette offre d'accès Internet gratuit Tigranet réservée à ses clients de 18 à 25 ans. Valable pendant un an, l'offre du Crédit Maritime Mutuel, pionnier de l'offre d'accès Internet gratuit dans le secteur bancaire, vise à fidéliser ses jeunes clients et à en séduire de nouveaux.
Les spécificités techniques sont comparables à celles déjà développées pour les précédentes offres pilotées par Internet Télécom.

Dans ses délibérations du 31 août 1999, le conseil d'administration d'Internet Telecom décide de créer des filiales afin de faciliter les opérations de croissance externe : filiales Tigranet, Internet Telecom UK et Internet Telecom Belgium. Internet Télécom compte exporter son concept de " grossiste de l'accès gratuit à Internet " au Royaume-Uni et en Belgique dans un premier temps.

Tigranet va ainsi présenter son offre d'accès gratuit à Internet sans revendiquer son appartenance au groupe Internet Telecom. (kit).

Sur le marché français, la concurrence est féroce. Alors qu'il n'y en avait aucun au 1er janvier 1999, l'Internet gratuit comprend déjà 16 fournisseurs d'accès au 31 décembre :

@ccès internet Spray Free.fr Freesurf
Libertysurf/Darty Lokace/Infonie VNUnet World Online
Netclic Dell (offre Dellnet) Tigranet Freesbee
Waïka 9 Kosmos Gateway Mageos

A compter du 20 décembre 1999, c'est au tour de la Caisse d'épargne Centre-Val-de-Loire de proposer à ses clients un accès gratuit à Internet, avec l'offre Tigranet en partenariat avec le prestataire de services Internet Télécom. Ses utilisateurs pourront se procurer l'un des 10.000 kits de connexion distribués dans les agences de l'Indre, de l'Indre-et-Loire et du Loir-et-Cher (je ne possède pas ce kit). Après le lancement des services Phonécureuil et Télécureuil, qui permettent un accès aux comptes par téléphone et Minitel, la Caisse d'épargne a voulu enrichir l'interactivité de ses prestations.


Internet Telecom a donc d'abord été un succès foudroyant, réunissant 1,2 million de clients en quelques mois. La start-up lève d'abord 12 millions de francs (1,83 million d'euros) en 1999 auprès d'ABN Amro, puis annonce début 2000 son intention de lever 100 millions de francs pour assurer son développement et prévoit ensuite de s'introduire en bourse. Las, c'est alors qu'éclate la bulle internet, elle réalise seulement par AGE du 5 avril 2000 une augmentation de capital dont 13,5 millions d'apport en numéraire, apportés pour l'essentiel par M6 Web (qui détient de ce fait 5 % des 11.535.714 actions de 1 franc de nominal) et des "business angels".

Mais les ressources publicitaires (qui finançaient en partie les accès internet) s'effondrent, l'ADSL vient remettre en question la partie VISP de son modèle économique et le ticket d'entrée du haut-débit est trop élevé pour les actionnaires actuels. Et pour couronner le tout, le 22 novembre 2000, Pinault Printemps Redoute son principal client en 1999 (75% du chiffre d'affaires), annonce qu'il cède son fournisseur d'accès Mageos à un concurrent (9 Télécom, filiale française de l'opérateur téléphonique italien Telecom Italia).

En 2000, les pertes s'élèvent à 20 millions de francs sur un chiffre d'affaires de 80 millions. Internet Telecom décidera le 9 novembre 2000 d'une augmentation de capital qui sera prévue en janvier 2001 de plus de 50 millions de francs, mais celle-ci ne se fera pas.

Ne pouvant plus s'appuyer sur ses investisseurs historiques (les fondateurs contrôlent 50 % des parts, ABN Amro 21 %, M6 5 %, des salariés et des " business angels " se partagent le reste), le groupe Internet Telecom cherche alors une solution "industrielle" pour poursuivre ses activités.

En février 2001, Internet Telecom engage un plan social portant sur 40 postes (sur un effectif total de 180 personnes), et un mandat de cession est confié à NetsCapital. Les noms de Suez et de Vivendi Universal circulent pour la reprise d'Internet Telecom. M6, déjà actionnaire et filiale de Suez, est même son premier client et représente un tiers de son chiffre d'affaires.

Le 22 juin 2001, le groupe Internet Telecom est finalement racheté par France Telecom e-business, filiale de France Télécom spécialisée dans le développement des solutions e-business pour les entreprises, créée en juillet 2000. Une acquisition pour un faible montant à 0,6068 franc par action soit 7 millions de francs (1,07 million d'euros) en cash, somme à laquelle s'ajoute une reprise de dettes de 30 millions de francs (4,57 millions d'euros).

Denis Pétonnet, président de France Télécom e-business commente : " Nous nous positionnons très fortement sur le marché clé de la Relation Client, domaine dans lequel Internet Télécom détient des compétences précieuses… ".

France Télécom stoppe le plan social lancé en février 2001, mais remercie l'équipe dirigeante. Sébastien Crozier, lui, échappe à cette purge, protégé par son mandat syndical. En effet, peu avant le rachat, il fut désigné délégué syndical d'Internet Télécom pour la CFE CGC, syndicat auquel il a adhéré dès 1993. Il grimpe ensuite les échelons au sein de la section CFE-CGC de l'opérateur historique devenu Orange, jusqu'à en prendre la présidence en 2006 et la conserver jusqu'à maintenant (en septembre 2025).

 
     

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